dimanche 3 février 2013

La sortie du dimanche - Théâtre : Le grand cahier


 (Non, je ne suis pas morte, je suis juste un peu lasse et désorganisée).

         La semaine dernière, je me suis rendue voir Le Grand Cahier, adapté du roman d'Agota Kristof et mis en scène par Paula Giusti. Et depuis, je n'ai eu de cesse de me questionner quant à la manière dont j'allais vous introduire cela.
Je n'ai toujours pas trouvé.
Quoi qu'il en soit, cette pièce ne m'a pas quittée. Voici donc un petit avis écrit un peu à tâtons, comme je suis encore toute chamboulée et émue par le petit bijou qu'il m'a été offert de voir.

Le grand cahier n'est pas racontable. Enfin, si : c'est l'histoire de deux jumeaux laissés chez leur grand-mère durant la guerre. Là, ils s'entraînent à affronter les duretés de la vie afin d'y devenir totalement insensibles. Ils jettent un regard froid et subjectif sur le monde qui les entoure en consignant toutes leurs observations avec une rigueur scientifique dans un grand cahier.
Bien entendu, cela est un bien piètre résumé. A travers cette histoire qui s'avère à la fois aussi crue que poétique, on peut y trouver une réelle vision psychologique des conséquences de la guerre. En effet, cet aspect psychologique se trouve dans le texte d'une part, mais tout particulièrement dans le fait que presque tous les personnages soient doublés, renforçant ainsi grandement la force du texte, le rendant par là assez vertigineux. Si les jumeaux ─ au fond, sont-ils bien deux d'ailleurs ? ─ semblent avoir prématurément quitté l'enfance malgré eux, l'on s'aperçoit que le monde des adultes ─ celui de la guerre, surtout ─ n'est pas plus sain d'esprit. La pièce aborde quelques grands thèmes de la guerre : perversions sexuelles, religion, sado-masochisme, destruction et torture.

 Un tas d'éléments rendent la pièce aussi chouette qu'elle l'est : la scénographie, simple, belle et efficace avec ces feuilles mortes et ces valises ; l'idée que les jumeaux soient des sortes de marionnettes vivantes manipulées par un narrateur-personnage comme si les jumeaux n'étaient en fait qu'un seul et unique personnage dont le narrateur serait l'incarnation ; et bien entendu la duplicité des personnages, que je trouve définitivement d'un grand intérêt. Ce concept peut sembler troublant au départ, mais apporte finalement énormément à l'ensemble du spectacle. La seule minuscule petite chose que je vois à reprocher est la fin un peu brutale, nous laissant avec un sentiment mêlant horreur et amertume (ce qui est plutôt bon signe, je trouve)  ─ mais ce n'est qu'un détail infime au regard de l'ensemble de la pièce. Je suis désolée de n'être pas en mesure d'en dire plus tant cette pièce est décidément irracontable et superbe, et je ne parviens vraiment pas à traduire l'impression qu'elle m'a laissée. Bref, tout ceci mérite grandement d'être vu.

Le grand cahier est actuellement en tournée dans toute la France (et même de passage en Suisse) jusqu'au 25 avril. Jetez donc un œil ici afin de savoir si la compagnie passe près de chez vous.

2 commentaires:

  1. Je découvre ton blog et il est superbement écrit !

    Tu m'as donné envie d'aller voir cette pièce, moi qui ne sait jamais où donner de la tête pour savoir quoi regarder au théâtre ! D'autant que le concept du double m'a l'air vraiment intéressant, et le côté "lugubre" des acteurs pose déjà l'ambiance, ça promet beaucoup !

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    1. Merci beaucoup.
      Ravie d'avoir pu te donner envie de voir la pièce ; elle mérite vraiment de l'être. La duplicité est en effet un concept incroyable.
      Pour ce qui est de l'aspect lugubre, toute la pièce est assez malsaine.

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